Raoul Follereau, né à Nevers le 17 août 1903 et décédé à Paris le 6 décembre 1977, est un écrivain et journaliste français, créateur de la journée mondiale de lutte contre la lèpre et fondateur de l’œuvre connue aujourd’hui en France sous le nom de Fondation Raoul-Follereau, qui lutte contre la lèpre et la pauvreté et promeut l’accès à l’éducation
Depuis plus de trente ans , ce français , journaliste au grand coeur , a consacré sa vie aux victimes de la terrible maladie .
Grâce à lui , des dizaines de milliers d'êtres humains ont recouvré la santé et reconquis leur dignité .
Un soir de janvier 1973, un couple revenant d'Afrique montait dans un taxi à l'aéroport d'Orly , tandis que la voiture roulait vers la capitale , le mari et la femme évoquaient les principales étapes de leur voyage . Lorsque le taxi s'immobilisa à l'adresse indiquée , le chauffeur se retourna vers ses clients .
- excusez-moi , dit-il , mais j'ai cru comprendre que vous étiez Raoul Follereau
-Vous nevous êtes pas trompé , répondit l'homme .
- Dans ce cas , permettez-moi de régler moi-même lacourse . Je suis un ancien lépreux et je ne peux tout de même pas vous laisser payer alors que je vous dois la vie .
Il n'est guère de semaines sans qu'un ancien malade témoigne d'une manière touchante sa reconnaissance à Raoul Follereau . Voici plus de trente ans que ce grand français se dépense sans compter pour combattre la rerrible maladie et l'intolérable injustice dont sont victimes 15 millions de lépreux .
En 1945 , aucun pays ne disposait de budget pour lutter contre la lèpre . Aujourd'hui , en grande partie grâce à Follereau , des centaines de jeeps, de fourgonnettes , de vélomoteurs portant son nom sillonnent les brousses africaines et les rizières aziatiques , transportant des agents chargés de dépister les sulfones qui permettent de la vaincre . Grâce à son action , également , le préjugé qui , pendant des siècles , fit des lépreux les véritables parias de la terre est aujourd'hui surnommé : on sait maintenant que la lèpre est beaucoup moins contagieuse que la tuberculose .
<< que , par sa seule volonté et son indomptable persévérance , écrivait en décembre 1967 Mr François Tombalbaye , alors président de la république tchadiene , un homme soit parvenu , en quelques années à ce résultat suscite notre admiration et nous permet de ne pas perdre espoir quant au destin del'humanité >>.
Les << intouchables >>
La lèpre est vraissemblablement originaire de l'Inde . On la trouve déjà mentionnée dans un traité de médecine indien datant de 600 ans avant notre ère . C'est entre le XIe et le XIIIe siècle qu'elle atteint son apogée en Europe . Sous le règne de Philippe Auguste , elle fait de tels ravages que chaque bourg est tenu de construire sa ladrerie . Les lépreux , lorsqu'ils en sortent , doivent agiter une clochette . Ils ne peuvent entrer dans les églises ni même toucher un objet autrement que du bout de leur bâton .
Depuis 1873, date à laquelle un médecin norvégien , Gerhard Hansen, en isole le bacille , on sait qu'il s'agit d'une maladie microbienne à longue période d'incubation (de deux à cinq ans ) . Elle n'est nullement héréditaire , comme on le croyait jadis . Mais sa transmission semble fonction d'une prédisposition qui rendrait certaines personnes plus vulnérables que d'autres .
Le contact prolongé avec des malades , dans des conditions de vie misérables , pourrait également jouer un rôle . Pour le Dr Louis-Paul Aujoulat, qui consacra vingt ans de sa vie à soigner les lépreux africains et fut maintes fois ministre dans divers gouvernements , <<la misère et la saleté sont les deux béquilles de la lèpre >>
Les pays les plus pauvres sont les plus touchés . Sur les 11 millions de lépreux officiellement recencés par l'Organisation Mondiale de la Santé "OMS" (mais le chiffre de 15 millions est, pour la plupart des médecins , plus proche de la réalité ), 6,5 millions vivent en Asie , 4 millions en Afrique et 360 000 en Amérique Latine . Parmi eux , 30 à 40 % sont atteints d'invalidité , car la maladie sous sa forme la plus avancée ronge peuà peu les mains , les pieds et les reliefs du visage . L'Europe ne compte plus que quelques milliers de cas , bénins pour la plupart car dépistés à temps . En France , plus de mille personnes étaient soignées en 1975 : toutes avaient contracté la maladie dans les anciennes possessions d'Afrique et d'Asie .
Scénes de cauchemar
C'est peu avant la dernière guerre que Raoul Follereau découvre cet enfer . Alors journaliste , il part pour le sahara , à la demande du journal argentin La Nacion , faire un reportage sur les traces du père Charles de Foucauld ; un jour , sa voiture tombe en panne à 4 km d'un petit village du Niger .
Soudain , il se voit entouré d'une quinzaine d'hommes et de femmes , certains n'ont plus de mains , d'autres sautillent sur des béquilles , car ils n'ont plus pour pieds que des bourrelets de chair tuméfiée . Tous ont le visage atrocement mitilé
- Qui sont ces hommes ? demande-t-il à son guide noir .
- Ce sont les lépreux du village .
- Pourquoi sont-ils ici, et pourquoi ne les soignent-t-on pas ? insiste Follereau .
- A quoi bon ? coupe le guide . Puisque je vous dis qu'ils sont lépreux ... Et il s'enfuit épouvanté .
Cette vision va désormais hanter Follereau ; le spectacle qui l'a tant choqué est, malheureusement , loin d'être l'exception . Aux abords d'une grande ville d'Afrique , il découvre quelques baraques branlantes en face de la décharge municipale ; C'est la maladrerie . En Inde , des lépreux sont entassés dans un terrain vague , non loin du fameux Tadj Mahall . <<j'en ai même vu , dit-il , enfermés chez les fous ou parqués en plein désert , entourés de barbelés . J'ai vu leurs plaies grouillantes de mouches , leurs taudis , les pharmacies vides et souvent, des gardiens armés de fusils .>>
C'est pendant le guerre que la vocation de Dollereau se précise . Quittant Paris , il se réfigie à Vénissieux , près de Lyon . Là , il apprend que les religieuses de Note-Dame des Apôtres veulent construire une léproserie à Adzopé , en Côte-d'Ivoire ; mais elles n'ont pas d'argent . Raoul Follereau voit une coïncidence providentielle entre cette volonté et l'expérience qu'il a pu lui-même accumuler . Sans hésiter , il offre sa collaboration .
Le 15 avril 1943, au théâtre municipal d'Annecy , il organise sa première conférence . Pendant deux heures , il raconte ses voyages et les scénes de cauchemar dont il a été témoin . Orateur-né , il sait, d'emblée, captiver son auditoire . Passant alors entre les travées , deux religieuses receuillent les premiers dons .